Le coeur régulier
J'ai fini récemment "Le coeur régulier" d'Olivier Adam.
Sarah, l'héroïne se sauve au Japon sur les traces de son frère mort récemment.
Voici ce que dit la 4e de couverture :
" « Vu de loin on ne voit rien », disait souvent Nathan. Depuis la mort de ce frère tant aimé, Sarah se sent de plus en plus étrangère à sa vie, jusque-là « si parfaite ». Le coeur en cavale, elle s’enfuit au Japon et se réfugie dans un petit village au pied des falaises.
Nathan prétendait avoir trouvé la paix là-bas, auprès d’un certain Natsume. En revisitant les lieux d’élection de ce frère disparu, Sarah a l’espoir de se rapprocher, une dernière fois, de lui. Mais c’est sa propre histoire qu’elle va redécouvrir, à ses risques et périls.
Grâce à une écriture qui fait toute la place à la sensation, à l’impression, au paysage aussi bien intérieur qu’extérieur, Olivier Adam décrit les plus infimes mouvements du coeur et pose les grandes questions qui dérangent."
C'est donc à la fois l'histoire d'un deuil, et celle d'une relation entre frère et soeur.
Au fil des pages on découvre une même relation au monde chez Sarah et chez Nathan, mais une façon complètement différente d'y réagir.
Sarah se coulera autant dans un certain moule de réussite sociale que son frère s'acharnera à s'y opposer.
J'ai aussi beaucoup aimé l'évocation du Japon et de sa culture entre tradition et modernité qui me fascinent énormément.
Extraits :
" Finalement elle n'était pas si jeune que je l'avais cru à l'enterrement. Peut-être 4 ou 5 ans de moins que moi. Mais il y a , paradoxalement chez certaines femmes moins attentives à leur apparence que dans le milieu où j'avais évolué ces dernières années, une façon de s'habiller, de ne se maquiller qu'à peine, de n'avoir recours aux UV aux pomades vendues à prix d'or à la chirurgie, de boire de l'acool, de fumer comme bon leur semble, de manger ce qu'il leur plaît de manger et de ne jamais faire de sport, de sortir le soir, de lire des livres, de penser, d'aimer la musique, le cinéma, la danse ou le théatre, qui les garde éternellement jeunes et irradiant d'une beauté autre, parfois usée, sans artifice "
Voilà un portrait auquel j'aimerais bien pouvoir m'identifier (la fumée en moins ) :-)
"Après nos bacs respectifs, nos chemins ont peu à peu divergé. Papa venait d'être mis au placard, dépassé par des jeunes types de vingt-cinq ans, tout juste sortis de Sciences Po, de l'ESSEC ou de HEC. Il avait commencé à travailler à seize ans, sans diplome ni la moindre formation, avait gravi les échelons un à un, jusqu'à ces zones où le travail, la compétence, l'expérience et le sérieux ne suffisaient plus jusqu'à ces sphères où l'on ne tolérait plus les autodidactes, où l'on gérait entre soi, armés du même pédigree, arrogants et cooptés. Sa froideur, sa fatigue de travailleur ont fait place à une amertume désabusée, au sentiment d'avoir été floué. Il était obsédé alors par la peur que ses enfants subissent le même sort, qu'ils se trouvent entravés par l'absence de diplome, il voulait pour nous les plus hautes écoles, les formations les plus cotées. J'ai suivi cette voie. Nathan non."
Je crois que tous ceux qui travaillent dans une grande entreprise comprennent ce qu'a vécu le père de Sarah. Il me semble que même le diplome ne compte pas tant que l'appartenance affichée à outrance à une certaine caste.
Les différentes influences ressenties par les personnages et le mal qu'ils ont à trouver leur voie est très bien décrit. C'est le dépaysement total et l'ambiance particulière d'un coin de Japon qui leur permet de prendre le recul nécessaire.
Et nous, où en sommes nous entre éducation, voie suivie, et aspirations profondes ? Et en conséquence de tout cela que transmet-on à nos enfants ?